Et voilà, dans moins de deux semaines c’est notre tour. Le contrôle approche et je le prépare tranquille. Cette année, je n’envoie pas de dossier en amont. J’ai bien compris qu’il n’avait pas été lu l’année dernière et que cela n’avait pas servi à grand chose. Je préfère me préparer des documents pour le jour J et ainsi me tenir prête à répondre à leurs questions, avoir sous la main de quoi justifier ce que nous faisons et pouvoir le défendre si besoin. Instruire est une chose, éduquer en est une autre. La dérive avec certaines inspections c’est que l’on considère l’instruction comme un devoir et non plus comme un droit. En tant que parent, nous apportons tous les supports nécessaires mais l’enfant a le droit de dire qu’il ne veut pas apprendre telle matière ou dans quel ordre il veut les apprendre, et de quelle façon. Ce qui m’embête avec les inspections c’est qu’elles nous enlèvent le droit de faire confiance, le droit au temps, le droit à la liberté d’apprendre ce que l’on veut, quand on veut et comme on le veut.

Alors, la plupart de ces inspections n’empêchent pas la poursuite de l’instruction en famille (le taux de demande de rescolarisation est semble-t-il, assez faible), toutefois elle met pas mal d’angoisses et de pressions sur le dos des parents, et par répercussion, sur le dos des enfants. J’ai choisi d’éduquer et non pas seulement d’instruire. Je ne me limite pas à remplir le cerveau des enfants de connaissances, je m’intéresse aussi à la façon dont je peux préserver leur créativité et la laisser s’épanouir, je choisis de les faire acteur de leur vie, de les mobiliser dès leur petit âge et à prendre conscience qu’ils ont des droits dans ce monde et qu’ils peuvent les faire entendre. Mon rôle d’éducateur me donne beaucoup plus de responsabilités.

Je me suis renseignée un peu plus sur la pédagogie Freinet comme elle a été définie à l’origine. Je trouve qu’elle correspond énormément à ma philosophie. Chez Freinet, les enfants sont vraiment acteurs de leurs apprentissages, il y a une vraie liberté qui leur est accordée et beaucoup de recherches sur les processus d’apprentissage naturel. On part vraiment de l’enfant, de son milieu, on valorise son environnement, ses centres d’intérêt, on le responsabilise et on l’accepte comme il est sans chercher à le faire rentrer dans un moule idéal. On se situe vraiment dans une définition de l’éducation populaire, un thème qui me tient à cœur.

Je considère notre vie comme un terrain d’expérimentations, un laboratoire des apprentissages où je fais aussi des essais, des erreurs, des nouveaux tests, des changements… Je suis actrice et ma propre observatrice à la fois. Je suis une chercheuse en éducation. C’est comme cela que j’aime me définir. (et mes enfants sont mes cobayes) ^^

Cette année, nous avons appris beaucoup de choses, ensemble ou séparément. Il y a eu l’arrivée de Loueï qui a amené ordre et désordre selon les périodes. Keyo a tenu ses cahiers sans que j’eusse besoin d’insister, pour lui c’était assez fluide. Il a saisi la notion de « combat » que j’ai pu évoquer avec lui, sûrement grâce au fait qu’il ait été si libre de contraintes ces deux dernières années et qu’il commence à grandir. Nos combats sont les domaines plus difficiles pour lui mais qui, une fois acquis, lui permettront d’être plus autonome et responsable encore, d’avoir accès à plus de choses. Nos combats sont la lecture et l’écriture. On en a relevé un sur deux et le deuxième est tout de même sur une très bonne voie.

La question que je me pose depuis longtemps c’est comment rendre compte des apprentissages informels de Keyo ? J’ai choisi la photographie et tenir un blog. Cela me permet de garder une trace et me rendre compte de son évolution de dingue. Cette année, nous aurons quelques cahiers, je dois avouer que leur présence me rassure un peu, surtout les cahiers d’écriture de Danièle Dumont qui nous permettent de montrer aux inspecteurs que nous avons fait un pas vers eux. Pour résumé, voici les supports que nous aurons :

  • les cahiers que nous utilisons : cahiers d’écriture de Danièle Dumont, des cahiers de maths et des cahiers de programme de CP et CE1 que Keyo a rempli de lui-même sauf le français ^^
  • ses premiers lapbooks sur l’évolution de l’homme et les insectes.
  • un classeur où sont rassemblées une grande partie des feuilles volantes des rallyes lecture, coloriages magiques, coloriages tout court et compagnie.
  • son cahier d’aventures que l’on met à jour à chaque fin de semestre avec les photos et les souvenirs conservés des visites.   
  • une synthèse globale qui regroupe nos sorties et nos supports par thème (j’ai suivi les thèmes du programme du cycle 2 pour parler le langage Éducation Nationale).
  • une liste des romans lus par mes soins et par Keyo (et oui ça y est, il sait lire, quelle libération !).
  • le journal de notre école à la maison : « Le journal des petits oiseaux libres » dont je ne vous ai jamais parlé encore mais que je ferai as soon as possible. C’est mon gros boulot d’avant cette inspection, il faut que je me mette à jour car ces derniers mois, je l’ai complètement abandonné (heureusement en bonne instagrammeuse et blogueuse que je suis, je vais pouvoir remonter le fil du temps ^^)  
  • un livret de réussite et d’autoévaluation rempli par Keyo et nous, les parents. Je n’ai jamais écarté Keyo de cette préparation à l’inspection. Évidemment, c’est moi qui m’en occupe mais j’ai décidé de lui en parler et de l’impliquer aussi dans ce rendez-vous. Il a le droit de savoir que quelqu’un va venir lui poser des questions et de s’y préparer. Avant-hier soir quand je lui ai dit que dans 15 jours, l’inspecteur viendrait, il m’a dit « oh punaise, faut que je m’entraine à lire ! » Et il a lu jusqu’au soir minuit avant de tomber de fatigue comme un ado qui prépare le bac… ^^ J’ai trouvé le livret de réussite sur le site de la pédagogie Freinet, je pense l’enrichir pour l’année prochaine d’autres domaines (les travaux manuels, scientifiques, artistiques, culinaires, …) mais pour cette année ce sera trop court.
  • j’aurai également pour moi, une carte mentale, elle m’a permise de construire un peu le cheminement des apprentissages informels. Si je vois que l’inspecteur est intéressé par le unschooling, je pourrai lui en parler, sinon cela n’apportera rien de plus.
  • un dernier classeur si besoin où je classe des articles relatifs aux apprentissages informels (par exemple : les articles de Peter Gray et autres génies de l’éducation)

Je prépare cette inspection un peu en réaction à celle de l’année dernière, même si l’inspecteur sera différent. J’y pense depuis longtemps, j’ai fais des choix destinés à être moins stressée et mieux préparée à leurs questions même si je sais que je ne pourrai pas tout parer (je suis en priorité le rythme de Keyo). Contrairement à l’année dernière, je ne vais pas tout sortir sur la table, je mettrai quelques essentiels et les supports listés ci-dessus. J’espère qu’on pourra vraiment dialoguer, c’est en tout cas ce que nous allons chercher à faire.

La maison sera bien rangée, je crois bien qu’on va y passer la journée de la veille entièrement. Je suis assez sereine car je sens que c’est notre troisième année en Instruction en Famille et qu’on a pris un bon rythme, on se fait confiance, je sais qu’il y a certaines périodes de l’année où l’on va travailler plus en formel et d’autres plus en informel, que tout cela s’équilibre et donc on ne va pas avoir besoin, avec Keyo, de s’imposer des temps de travail plus importants parce-que l’inspection arrive. Je fais même plus d’effort pour être relax, cela ne sert à rien de se mettre la pression, ce qui n’est pas acquis maintenant, ne le sera pas non plus dans 10 jours. Et puis, ça se passera comme ça se passera !

Et vous les homeschoolers, l’inspection est passée, pas passée ? On croise les doigts des deux mains et on respire un bon coup 🙂