Dans quelques jours, il a 7 ans. 7 ans à l’extérieur de moi. 7 ans qu’il est ma tempête et mon radeau. 7 ans qu’il m’apprend à être meilleure (meilleure patiente, meilleure calme, meilleure tolérante, …^^). 7 ans qu’il me challenge dans mon rôle de maman. 7 ans qu’il m’apprend ce que c’est être parent. Une expédition en terre inconnue, des vagues d’amour et de colère, un miroir de nos névroses, une initiation au changement, des retrouvailles avec l’enfant qui s’est un peu perdu en nous. 7 ans. C’est un peu comme un nouveau commencement.

Allez on va faire comme si on était sûr de nous maintenant, on se connait, je sais comment il va réagir quand je lui dis cela, qu’on peut parler tous les deux, que je suis sa meilleure confidente. Je sais ce qu’il n’aime pas, je sais pourquoi il dit cela, pourquoi les gens l’adorent ou pourquoi ils le réprouvent. Je sais qu’il sait mettre le doigt sur ce qui nous fait bondir, qu’il n’a peur de rien et qu’il déteste qu’on lui parle comme à un enfant. Je sais que dans sa tête il aimerait déjà être grand mais que son coeur bat encore comme celui d’un tout petit.

Je sais qu’il est peut être dur et insolent. Je ne l’encourage pas, j’essaie de troquer la colère des mots avec la justesse des mots. On parle. On parle beaucoup. Mais au fond, je me demande parfois : est-ce que je ne l’aime pas un peu son insolence, sa capacité à dire les choses sans avoir peur ? A être lui quand les autres aimeraient qu’il soit eux ? Est-ce que moi, je n’aurais pas aimé être un peu plus comme cela ? Ce sont des questions en suspend…

Je lui ai dit : “ne laisse personne te faire croire que tu es une mauvaise personne.”

Il m’a dit : “je sais qu’il y en a qui pense que je suis un mauvais garçon.”

Je lui ai dis : “dans la vie, ils seront nombreux à ne pas t’aimer, à vouloir te rejeter. Le rejet est la première réaction à ce qu’on ne connait pas, à l’étrange, à l’étranger. Tant qu’ils ne te connaitront pas comme je te connais, ils ne sauront pas à côté de quoi ils passent. Ce n’est pas une raison pour en faire plus, sois toi-même. Le vrai toi, celui qui rit, qui éclate de joie, qui joue, qui dit crotte de biquette et triple slip, qui aime les autres, qui aime leur faire plaisir, qui aime être entouré, qui aime parler fort. Regarde autour de toi, tu n’es jamais seul. Moi en tout cas, je ne serai jamais loin.”

Il m’a dit: “oui maman.”

Là où j’ai grandi n’est pas le même endroit où tu grandis. J’étais trop timide, tu aurais été un poisson dans l’eau. J’ai entendu un professeur des écoles dire, il y a quelques jours “il faut accepter que tous les enfants ne sont pas fait pour écrire !” Mais oui, quelle perspicacité. Toi, tu es un orateur, tu aimes les joutes verbales, tu aimes trouver les mots qui font rire ou qui surprennent. Tu as encore du chemin à faire pour apprendre les contours de l’humour mais il y aura un espace pour toi, le monde est vaste.

Il y a plein de souvenirs que j’ai de toi. Mais je crois que celui que je préfère c’est toi assis, chaque jour, à ce bureau, dans ton labo comme tu dis. Tu me rappelles mon grand-père dans son garage qui avait tous ses outils dans un coin. J’ai l’impression qu’il faisait toujours sombre là-dedans. Je me demande comment il faisait pour tout réparer. Il devait avoir une petite lumière mais je ne me souviens pas très bien. Dans ton air si concentré, je vois un peu de lui, un peu de mon passé. Tous les jours en me levant, je passe la tête par la porte entrebâillée et j’ai l’impression d’être de nouveau l’enfant dans ce garage.

Les derniers jour d’enfance. En soi, je suis un peu en avance. Je crois que je suis un peu nostalgique avant l’heure. Il y aura encore une année ou deux, mais cette enfance désinvolte va s’estomper, je le sais. Seul Peter Pan reste un enfant toute sa vie, les autres finissent par grandir. Et c’est bien aussi. Toi, je crois que tu es pressé. Peut-être n’estimes-tu pas bien tout ce que tu perds, et que tu vois seulement ce que tu gagnes. Comment te le reprocher ? Il n’y a que les grands pour regretter. Les enfants ne sont que vie.

Et sans vouloir paraphraser Monsieur Brel mais en le faisant quand même, je te souhaite d’accomplir les rêves les plus fous mon beau.