Il y a encore une année de cela, j’étais assez perdue avec l’enseignement de la géographie. J’avais déjà traduits le Manuel de géographie de Charlotte Mason et cela m’avait beaucoup aidé à me détacher de manuels actuels que je trouve trop sec pour être utilisés tels quels. La géographie est une matière très importante dans la pédagogie de Charlotte Mason et j’ai démarré un travail de fond depuis deux ans que je poursuis encore aujourd’hui, notamment avec la traduction et la révision des manuels de géographie suivants de Charlotte Mason (elle en a écrit 5 au total).

Dernièrement, je me suis plongée dans le livre “Toute la géographie du monde” de Jean-Claude Barreau et Guillaume Bigot ; dès l’introduction j’ai été scotchée par leurs mots avec lesquels Charlotte Mason, si elle était encore vivante, serait sûrement d’accord :

“Les Français n’ont jamais autant voyagé, mais ils n’ont jamais autant ignoré la géographie ! Jamais les images du monde n’ont été aussi accessibles (…) mais encore faut-il pouvoir interpréter ces images stupéfiantes, c’est-à-dire savoir un peu de géographie ! On voit tout et tout de suite mais on ne comprend rien.”

Et les auteurs poursuivent :

“Voyager implique de la patience et beaucoup de temps passé au ras des choses. (…) Le vrai voyageur sait à quel point la Terre est immense. (…) On trouve encore de véritables voyageurs, sans assistances et sans liaison, qui cheminent à l’écart des chemins battus et observent en géographes. Leurs livres, ceux des “écrivains voyageurs”, ont du succès, mais un succès mélancolique. Pour voyager aujourd’hui, il faut vraiment le vouloir. Tout ceci explique que nos grands-parents, qui se déplaçaient beaucoup moins que nous, étaient en réalité plus avertis de géographie que nous.”

Mais, la géographie physique et descriptive a malheureusement disparu. Son enseignement a été “étouffé par les chiffres, les statistiques et la technicité.”

Cette dernière phrase me renvoie complètement aux manuels de géographie utilisés actuellement dans les écoles. D’eux, on ne comprend rien alors que la géographie “reste absolument nécessaire à qui veut comprendre le monde.”

Voilà pourquoi, j’ai troqué les manuels par des récits de voyageurs depuis un moment déjà et plus récemment par les manuels de Charlotte Mason et des atlas. J’ai également fait de nombreuses recherches en ce qui concerne tous les exercices réalisables avec des cartes car c’est de cette façon que l’on acquiert une vision intelligente de l’espace dans lequel nous vivons.

En effet, chaque élément physique de la géographie “engendre de fortes contraintes qui permettent parfois de comprendre le destin d’une nation.” Les géographes peuvent prévoir longtemps à l’avance les risques de conflits entre pays…

Apprendre le dessin de cartes : pourquoi et comment ?

« On a reconnu depuis longtemps que le meilleur et même le seul moyen d’apprendre la géographie est d’étudier continuellement les cartes générales et particulières. Les élèves qui retiennent le mieux la position des lieux et les noms de pays, des villes et des autres accidents de notre globe, sont ceux qui, en lisant l’histoire et les ouvrages classiques, ont souvent recours à leur Atlas. »

Charlotte Mason aurait été d’accord avec cette citation. Elle a été écrite par M. Lamotte dans son ouvrage « Géographie enseignée par le dessin » qui m’a été d’une grande source d’inspiration dans l’élaboration de mon programme de géographie pour le cycle 3.

Cette technique me rappelle un peu celle que nous apprenions enfant avec des dessins à compléter en symétrie. Je crois que cela rentre dans la catégorie “géométrie” puisque les enfants apprennent à se repérer sur une grille et utilisent une règle.

Point de règle ici, mais par contre nous travaillons la concentration et le sens de l’observation tout en prenant conscience de chaque détail physique d’une carte.

A l’aide d’un quadrillage et d’une carte également quadrillée (modèles et grilles vierges fournis dans le programme de géographie mais vous pouvez aussi fabriquer les vôtres), l’enfant reporte chaque élément, carré par carré.

Cela marche avec tout type de carte, que ce soit une région, un pays, un continent, le monde entier !

Pourquoi utiliser une grille ?

La grille est une version un peu arrangée des lignes de latitude et de longitude, c’est pourquoi lorsque l’enfant grandit, il est encouragé à se passer de ces grilles mais plutôt à regarder un atlas ou une carte (qui laisse apparaître les lignes de latitude et de longitude) et va fonctionner de la même manière sauf qu’il va devoir, au préalable, construire sa propre grille. Grille qui, cette fois, n’a rien “d’arrangé” mais correspond aux valeurs admises partout.

Dans les écoles Mason, les élèves apprenaient à mesurer un pays à l’aide de ces lignes. Les cartes ne laissent pas toujours bien voir la taille réelle d’un pays car l’échelle de valeur peut être modifiée alors qu’en utilisant ces lignes, on apprend la précision et on a une meilleure vision de l’espace qu’un pays ou tout autre élément occupe. Depuis que j’ai conscience de cela, je suis très sensible à la façon dont est présentée une carte ; certaines, par exemple, élargissent l’hémisphère nord et l’équateur se trouve plus bas que le milieu, les pays de l’hémisphère sud paraissent plus petits. C’est dérangeant car cela tronque la réalité.

Les lignes de longitude permettent également de savoir quels sont les pays qui ont le Soleil et la nuit en même temps (cela nous a fait tout drôle quand on a déménagé de Nice au Bassin d’Arcachon d’avoir “gagné” 1h le soir ; en effet, en regardant la carte, nous sommes plus alignés sur Greenwich que sur Paris) ; les lignes de latitude permettent de savoir quels pays partagent à peu près les mêmes climats (bien que d’autres données, notamment le relief, peuvent rentrer en ligne de compte).

Divers exercices de cartographie

  • Remplir des cartes vierges : l’enfant prend quelques minutes pour étudier la carte avec les noms des villes, pays, rivières, montagnes, océans… tout ce qu’on souhaite qu’il apprenne. Puis sur une carte vierge préalablement imprimée, on demande à l’enfant d’écrire le plus de noms possible dans un temps imparti. La semaine suivante, on lui donne une autre carte vierge, on lui demande de réécrire ceux qu’il a appris et d’en ajouter quelques-uns… Et on répète cet exercice chaque semaine. Une variante consiste à plastifier la carte vierge et d’écrire avec un feutre pour ardoise.
  • Placer les étiquettes : parfois l’orthographe/l’écriture peut freiner un enfant dans la réalisation de cet exercice dont l’objectif est de connaître le nom des lieux et non pas spécialement le travail d’écriture. L’utilisation d’étiquettes peut donc être une solution.
  • Tracer les frontières : de mémoire ou en repassant sur les traits. Cela permet de retenir l’emplacement et la forme des départements/régions/états/pays et les prépare au dessin de cartes. C’est une activité importante pour les plus jeunes.
  • Utiliser du papier calque pour faire ses propres cartes : avant que l’imprimerie se développe, explorateurs et cartographes utilisaient la technique du transfert pour réaliser leurs cartes. Cette méthode est amusante et demande à l’enfant d’être attentif aux détails.
  • Dessiner sa propre carte : à partir de 9 ans, cet exercice se fait avec une grille comme indiqué plus haut ; puis on remplace la grille toute faite par les vraies lignes de latitude et de longitude en respectant l’échelle.
  • Poser des questions avec une carte : à partir de 9 ans, les enfants ont 10 mn de questions sur carte par semaine ; mais globalement tout récit devrait être suivi sur une carte afin d’entraîner l’esprit à bien visualiser chaque emplacement sur une carte.

L’idéal est de combiner avec la lecture de livres vivants toutes ces différentes activités car elles sont complémentaires et maintiennent un intérêt élevé pour la géographie.  

La géographie devrait devenir la plus charmante occupation de la journée de l’enfant.

Charlotte Mason

Des ressources pour la cartographie

  • La base : des cartes ! Vous pouvez consulter mon article “Comment choisir un atlas ?“. Personnellement ma préférence va aux bonnes vieilles cartes Michelin et au “Nouvel atlas géographique du monde” qui est ouvert tous les jours chez nous.
  • New : Un fichier dédié à la cartographie est disponible sur ma boutique !
  • ou vous pouvez aussi le trouver dans le programme de géographie pour le cycle 3 qui complète le travail de cartes avec 9 récits de voyage.
  • Le premier livre de géographie de Charlotte Mason commence à poser des questions sur cartes vers la fin de l’ouvrage (car ce travail formel commence plutôt au niveau CE2).
  • Le second livre de géographie de Charlotte Mason que j’ai traduits et adapté à la fois à notre pays, mais aussi à notre époque (tout en conservant le style et le charme de Charlotte Mason).
  • Le roman “Sans famille” d’Hector Mallot se déroule au quatre coins de la France : à lire avec une grande carte affichée au mur pour suivre ses déplacements 🙂
  • Le livre “Le tour de France par Camille et Paul” d’Anne Pons : il existe en deux tomes ; le premier se déroule sur la partie Ouest de la France et le second sur la partie Est. Certains passages sont un peu datés mais c’est un des rares livres “vivants” qui existe en géographie française.
  • L’art de cartographier le monde” par Carpe Diem ; une ressource que je n’ai pas utilisée mais dont j’ai entendu beaucoup de bien.
  • Des albums pour les plus jeunes : “Sam cartographe“, “Me on the Map” (en anglais), As the Crow Flies: A First Book of Maps (en anglais), “Geography from A to Z: A Picture Glossary” (anglais) : il y a peu d’ouvrages en français sur le sujet mais il est toujours possible d’utiliser des livres en anglais. Pour rappel, la pédagogie Mason est très transversale et donc on peut faire de l’anglais en géographie ou de la géographie en anglais ^^
  • Si on considère que la cartographie commence rien qu’en suivant des récits sur une carte, tout livre (albums, récits de voyage, romans…) contribue à poser les bases de la cartographie.
  • Je vous conseille également la lecture du livre “Toute la géographie du monde” de Jean-Claude Barreau et Guillaume Bigo. Je pense qu’il pourrait même être utilisé avec les enfants à partir du cycle 4 en combinant la lecture + la carte.

Si jamais vous connaissez d’autres ressources, n’hésitez pas à les partager en commentaires !