Il y a un peu plus d’un an, nous avons quitté notre belle région niçoise dans laquelle nous avions vécu pendant trois ans. Je ne l’ai pas vécu tout de suite comme un déchirement. Je partais, mais je reviendrai. Et j’avais besoin de partir chercher un nouveau souffle, chercher le bonheur ailleurs.

Cette dernière année à Nice fut aussi belle que difficile. Belle par toutes les choses que nous y avons faites, mais difficile car mon mari traversait une période compliquée due à une blessure au genou qui ne guérissait pas, que personne ne savait soigner et qui le rendait par conséquent “fini” aux yeux de son entraineur de rugby.

Partir. Partir c’était tout recommencer, c’était trouver une maison, vivre près de l’océan, c’était faire de nouvelles rencontres et partir à l’aventure dans de nouveaux lieux.

Partir ça m’a presque fait l’effet d’un soulagement.

Puis nous avons emménagé. Dès le premier jour, cela a été compliqué. Nous nous sommes retrouvés seuls pour vider le camion (avec tous les électroménagers que mon mari a porté seul), nous nous sommes pris dans les embouteillages pour rendre camion, nous l’avons rendu en retard et nous avons reçu un surplus bien salé sur la facture. Dès cette première journée, j’étais en pleure. La fatigue, la pression, les galères qui se sont enchaînées…

Et les choses ne se sont pas améliorées par la suite. Bien sûr, il y a eu des bons moments, des pique-nique à l’océan, des grosses vagues qui te renversent et te font rire, des petits-déjeuners dehors, des amis et de la famille… et surtout de belles rencontres, des vraiment belles très rapidement.

Mais en fond, tout continuait à foutre le camp, les galères financières se sont enchainées à un rythme que nous n’arrivions plus à tenir et de nouveau du côté professionnel pour mon mari, tout était sombre. Et la cerise sur le gâteau fut une énième blessure.

Je ne sais plus combien de temps cela a duré, j’ai arrêté de compter.

Ensuite, nous avons emménagé dans une seconde maison. La chance nous souriait enfin (car je ne vous raconte pas la galère incommensurable pour accéder à la location sur le Bassin d’Arcachon). Un nouveau départ qui fut rapidement entaché par tout un tas de nouvelles merdes que je ne vais pas même pas listé ici. Mais le froid, l’humidité et la moisissure m’auraient vraiment fait fuir si je n’avais pas un mental de battante. Je pensais toujours à ceux qui avaient moins que moi pour me rappeler à quel point, dans notre malheur, nous allions bien.

Le printemps est arrivé et là les choses sont allées vraiment mieux. Un boulot plus stable pour mon mari, une douceur de vivre et une maison qui se réchauffait. Le moral est remonté et nous avons profité, mais toujours avec un goût amer.

Je n’ai pas réussi à m’attacher à cette région. Et pourtant, j’ai rencontré des gens fantastiques. Au fond de moi, je me suis dit, “heureusement qu’ils sont là” tellement de fois. Mais aussi beau est le lac de Cazaux, aussi belle est la Dune du Pilat, aussi majestueux est l’océan, aussi sauvages sont les près salés, je n’ai pas pu, pas su m’attacher à cette région.

Est-ce que sans toutes ces galères, nous aurions été mieux ? Sans aucun doute. Mais est-ce que l’on peut se sentir bien ou chez soi partout ?

J’ai assez déménagé pour savoir qu’on finit par s’habituer même à un endroit où l’on n’est pas bien au début. Mais j’ai aussi assez déménagé pour le faire encore une fois et dans un lieu qui me plaît vraiment.

La question du retour aux Alpes Maritimes s’est sérieusement posée. Mais il y a eu plusieurs réflexions que j’ai eu à ce sujet : que recherchions-nous dans ce retour ? Une nouvelle vie ou notre ancienne vie qui ne pourrait plus exister ? Retrouver les amis, les copains qui nous manquent ? La fête, le climat, le plaisir ?

En avril ou mai, je ne sais plus exactement, j’ai lu “Humains, la Roya est un fleuve” que l’on m’avait offert à l’époque où nous vivions à Nice mais que je n’avais jamais ouvert jusque là. Et c’est un torrent de larmes qui m’a envahi. Revoir les paysages, les noms, l’ambiance de ce lieu où nous avions tant aimé être m’a fait évacuer toutes les émotions de cette année où pas une larme ne fut versée depuis le 1er juillet, au moment du retour du camion. Et au-delà de cette année de misère, je crois que j’ai fait à ce moment-là le deuil de la Côte d’Azur.

En juin, je suis allée à Perpignan. Et j’ai eu comme une révélation face aux montagnes. Ce paysage sans relief du Bassin d’Arcachon était soudain remplacé par un sentiment d’espace enivrant.

J’ai su à ce moment-là que c’est en Terres catalanes françaises que je voudrais vivre. Je ne saurai pas expliquer vraiment pourquoi. Bien sûr, il y a toutes les raisons faciles : le climat méditerranéen, le foncier pas cher, les montagnes, la frontière avec l’Espagne, les 3h de route qui me rapprochent de notre maison de famille en Espagne dans laquelle je ne vais plus parce-que je vis toujours trop loin, les 5h vers Nice pour retourner le temps de quelques jours plus facilement voir les copains azuréens, cette terre historique que quelques uns de mes ancêtres ont foulé après avoir fui l’Espagne en guerre…

Et puis il y a des raisons qu’on explique pas. Une quête du chez soi qui s’achève ici. Comme si tout ce qu’on recherchait en nous et dans la vie, prenaient forme dans un lieu qui n’a pas vraiment de limites définies.

Maintenant, il ne nous reste “qu’à” trouver notre maison. Mais je le sens, la vie m’a amené ici et tout va aller pour le mieux maintenant. Le mieux même dans les galères parce-que j’ai retrouvé la force et l’espoir que j’avais perdu en route.