S’il y a bien un outil dont la plupart des gens s’intéressant aux différentes pédagogies retiennent de celle de Miss Mason, c’est bien la lecture de livres vivants et la narration !

Grande adepte du unschooling à nos débuts, j’étais assez réticente à l’idée de demander à Keyo de narrer un passage lu. D’autant plus, que lorsque je le faisais, cela apparaissait trop comme du travail et le plaisir de se faire lire une histoire fuyait. La lecture n’était plus un cadeau. Mais j’ai finis par distinguer les lectures offertes et celles qui demandaient un effort d’écoute et de restitution dans le cadre de notre temps de travail.

Les lectures offertes étaient lues le soir ou en dehors de ce temps de travail, tandis que les lectures suivies de narration se faisaient bien dans le cadre des leçons. Charlotte Mason préconisait de commencer les narrations formelles à partir de 6 ans, pas avant.

L’oralité est très encouragée les premières années, puis on commence à demander à l’enfant de fournir un travail de narration écrite. Il y a encore quelques mois, j’étais loin d’imaginer que nous allions passer ce cap. Le travail d’écriture paraissant si compliqué pour Keyo. Et pourtant, nous y sommes ! Comme quoi, il ne faut jamais désespérer.

De la narration orale à la narration écrite en images

A travers son cahier consacré aux narrations d’histoires lues, je me rends compte du chemin parcouru. Au début ni le dessin, ni l’écriture n’y était développé. Cela demandait beaucoup d’efforts. Au début, les dates sont éloignées. La régularité d’utilisation n’y était pas. Nous utilisions seulement la discussion (ce qui était normal !). Puis Keyo s’est mis à aimer le dessin, illustrant une scène dans sa tête qui l’avait marqué. Il me dictait un résumé que j’écrivais à sa place. Avec le recul, je me demande si cette dictée à l’adulte est vraiment nécessaire… Mais c’est un autre sujet 🙂

Les premières pages datent de 2016… Soit presque 4 ans ! Il avait tout juste 6 ans.

Entre 2018 et 2019, il s’est mis à écrire quelques mots à la fin d’un livre : juste le titre puis un résumé très court.

Début 2020, il narre à l’écrit après chaque passage. Je lui ai proposé cela lors de notre rentrée début janvier. Le défi : illustrer une scène et écrire sa narration après chaque passage lu. Je crois qu’il était prêt car il a accepté sans soucis.

Alors comment cela se passe ?

  • Je lis un passage, m’arrêtant de temps en temps pour être sûre qu’il me suit et pour discuter si le passage fait débat ^^
  • Lorsque 15 minutes à peu près sont passées, je lui demande de faire une narration à l’oral.
  • Je lui pose quelques questions, on échange puis je lui demande quelle scène l’a marqué dans sa tête, laquelle il a envie de dessiner.
  • Ensuite, nous travaillons sur la construction de son texte. Quel pourrait être la première phrase ? Puis la suivante ? Généralement on est sur 2 phrases en moyenne. Au début, je l’aidais un peu plus à rédiger son texte et maintenant, je n’ai quasiment plus besoin d’intervenir.
  • On écrit sur notre tableau Velleda les phrases. Nous notons ensemble les mots compliqués. Il regarde bien l’orthographe de tous ces mots, puis il écrit au propre dans son cahier en s’entrainant à la lecture globale le plus possible.
  • Au vu de son âge, cela lui permet d’accélérer son écriture. Il a tendance à lever la tête après chaque lettre, étant tellement peu sûr de lui. Alors je l’entraîne à la lecture globale. Je lui dis de bien regarder le mot, d’en prendre une photo et hop de l’écrire d’une traite ou au moins syllabe par syllabe si le mot était trop long et compliqué.

Une mémoire plus efficace

Cet exercice prend évidemment plus de temps que la simple narration à l’oral. Cela allonge nos temps de travail mais il faut un temps d’adaptation. La première fois cela a duré longtemps, puis de moins en moins. J’estime, par ailleurs, que Keyo grandit, et son temps de concentration s’allonge. Il est capable de travailler plus longtemps.

Par ailleurs, je me suis rendue compte que la narration écrite est bien plus efficace pour la mémorisation. Avant chaque lecture, Keyo résume le passage précédent. Une fois, pressé par le temps, nous avions sauté la narration écrite, se contentant seulement de l’oral, le lendemain, Keyo me résumait la passage de l’avant veille. Il avait complètement oublié le passage qui n’avait pas été narré à l’écrit. En lui rappelant quelques scènes, ça lui est revenu rapidement, mais sa mémoire n’avait pas inscrit les faits aussi profondément.

C’est à ce moment-là, que je me suis rendue compte de la force de la narration écrite. Elle prend du temps, mais le travail est multiple : travail de mémoire, dessin, construction de phrase, travail sur la ponctuation, la conjugaison, puis l’écriture. Tout cela de façon vivante (ce sont ses mots à lui sur une histoire qu’on lit ensemble et qu’il aime) et en 20 minutes environ (en plus de la lecture).

Narrer en dessins…

Ce qui peut prendre du temps c’est le dessin. Rien n’oblige les enfants à le faire. Keyo aime bien mais on peut très bien imaginer un simple cahier ligné avec les narrations écrites successives. J’avais bien aimé une idée de Crapaud Chameau : Le cahier des histoires à raconter. Cela pourrait convenir aux enfants qui n’aiment pas dessiner. Et personnellement, je trouve cela tellement plus vivant qu’un rallye lecture… Non désolé je n’accroche vraiment pas aux rallyes. Mais peut-être que j’y reviendrai dans un prochain article ^^

A bientôt !